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26 mai 2017

Assurance vie et devoir de conseil : la Banque Postale sanctionnée

L’ACPR a rendu, le 18 mai, sa décision dans la procédure disciplinaire engagée le 26 février 2016 à l’encontre de la Banque Postale, concernant ses fonds de placement Progressio qui avaient entraîné des pertes financières de 18,6M€ pour ses clients. Verdict : un blâme et une sanction pécuniaire de 5 M€. Parmi les griefs retenus, l’ACPR pointe les défaillances en matière de devoir de conseil et du dispositif de contrôle interne.
 

Les faits sont, certes, spécifiques. Mais les motifs de sanction sont riches d’enseignements. Dans sa décision concernant La Banque Postale et de ses fonds communs de placement Progressio (Procédure no 2016-04), la Commission des sanctions de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) rappelle en effet un certain nombre de points de droit et de règlementation en matière de recueil d’informations clients et de devoir de conseil qui doivent être scrupuleusement respectés.

Une allocation d’actifs désastreuse

Les faits sont simples, et avaient déjà valu à La Banque Postale (LBP) une amende (1,5M€) et un blâme de la part de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). En 2005 et 2006, LBP lance les fonds communs de placement (FCP) Progressio; des fonds avec garantie en capital à la sortie (8 ans), notamment souscrits dans des contrats d’assurance sur la vie en unités de compte. En matière de gestion d’actifs, LBP fait alors des arbitrages qui vont s’avérer désastreux : l’établissement remplace des actifs considérés risqués par des obligations d’Etats, notamment grecques. Lorsque la crise des dettes souveraines éclate, en 2010, LBP est dans une mauvaise passe. En 2011, il est constaté une chute de -15% à -30% de la valeur liquidative, et l’AMF intervient une première fois. Au total, la perte effective pour les clients s’élève à 18,6 M€ dont 9,3 M€ entre le 1er janvier 2012 et le 1er octobre 2014. Près de la moitié de ces pertes résulte « d’opérations de rachat et d’arbitrage, le solde résultant de la fin du contrat à la suite du décès du souscripteur », précise l’ACPR.

Une clientèle mal informée
Au-delà du sujet strictement lié à la stratégie d’allocation d’actifs de LBP, qui n’est d’ailleurs pas le seul établissement à avoir été touché sur la période, ce sont les dysfonctionnements relevés dans ce contexte en matière d’information et d’accompagnement des clients qui sont au cœur de la décision de l’ACPR. C’est d’ailleurs à la suite d’un contrôle sur place de huit mois diligenté par l’ACPR chez LBP, en tant qu’exerçant l’activité d’intermédiation en assurance, que l’ACPR a décidé d’ouvrir la procédure disciplinaire qui a entrainé le blâme et l’amende de 5 M€. Parmi les griefs énoncés, « LBP n’a pas, lors des souscriptions qui ont fait suite à des opérations de rachat relatives à des contrats d’assurance sur la vie adossés aux FCP Progressio, respecté les obligations qui lui incombaient au titre du devoir de conseil ; elle n’a, sur ce sujet, pas respecté ses propres procédures, qui prévoient le recueil, par les conseillers, des informations relatives au client (situation financière et objectifs de souscription), la formalisation de ses besoins et exigences ainsi que des raisons qui motivent le conseil fourni, au moyen d’une « fiche de préconisation » et d’une « synthèse DRC » (dossier relation client) ». Plusieurs autres lacunes voire manquements avérés aux obligations légales ont au final été relevés par l’ACPR.

Un dispositif de contrôle interne défaillant

Dans ses conclusions, l’ACPR résume ainsi ses différents constats : « le dispositif de contrôle interne de LBP ne couvrait pas de manière satisfaisante, à la date du contrôle, son activité d’intermédiation en assurance et les risques afférents, notamment au titre de contrats d’assurance sur la vie en unités de compte tels que ceux en cause dans la présente procédure ; qu’en conséquence, les contrôles permanents comme périodiques mis en oeuvre pour s’assurer du respect de la procédure Progressio, diffusée pour prévenir les clients des pertes liées au rachat, avant l’échéance de la garantie en capital à 100 % qu’ils comportaient, de contrats ayant pour support des unités de compte adossées aux FCP Progressio, ont été très insuffisants ; que cette procédure a été mal appliquée, ce dont il a résulté pour LBP un risque de non-conformité dont l’importance tient notamment au nombre de clients ayant souscrit des contrats comportant en leur sein des FCP Progressio et aux pertes financières qu’ils pouvaient subir en cas de rachat anticipé ; que, de plus, dans le cadre de cette même activité, il apparaît que le recueil des informations auprès des clients était lacunaire, de même que la communication au client des raisons qui motivent le conseil fourni, de sorte que les exigences relatives au devoir de conseil et en particulier à sa formalisation n’étaient pas correctement satisfaites ».
 

Catherine Dufrêne