Codes courtage

Le webzine de PLANETE CSCA

Accueil > Webzine > L'actualité du courtage > Réglementations > Le défaut « d’intérêt légitime à agir » de l’assuré contre un courtier pour détournement de primes

8 septembre 2017

Le défaut « d’intérêt légitime à agir » de l’assuré contre un courtier pour détournement de primes

Cour de cassation Chambre civile 2, 8 juin 2017, 16-18815. Rappel : Contrairement au souscripteur et au(x) bénéficiaire(s)s du contrat d’assurance sur la vie, un assuré qui n’est ni souscripteur ni bénéficiaire de l’épargne investie ne justifie pas d’un intérêt légitime à agir contre un courtier pour un éventuel détournement de primes.
 

Nous sommes en présence dans cette affaire d’un associé majoritaire (l’assuré au sens du contrat d’assurance vie) et de la société Stell Holding qui avait souscrit des contrats d’assurance sur la vie par l’intermédiaire d’un courtier d’assurance moyennant le versement de deux chèques tirés sur le compte de l’entreprise et libellés à l’ordre d’une compagnie d’assurance.

Ce courtier avait souscrit une garantie financière auprès de la Caisse de garantie des professionnels de l’assurance.
Lors du rachat de ces contrats d’assurances vie par la société souscriptrice, l’assuré s’est aperçu du détournement des primes opéré par le courtier, en encaissant les chèques sur son compte personnel, et a assigné, en première instance, la Caisse de garantie en remboursement du montant de ces chèques détournés.

L’assuré a été débouté au motif que les primes ont été versées non par l’assuré mais par la société souscriptrice des contrats et que les primes revenaient au souscripteur en cas de vie et en cas de décès au conjoint de l’assuré ; l’assuré ne justifiait pas ainsi d’un intérêt légitime à agir en vertu de l’article 31 du Code de procédure civile. Ces derniers ont alors fait appel de la décision.

En effet, l’article 31 du CPC dispose que « L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »

Enfin, la garantie visée par l’article L530-1 du code des assurances dont l’assuré entendait bénéficier étant « spécialement affectée » au remboursement des fonds versés par les assurés, en vue d’être remis à des entreprises d’assurances, ce dernier, bien qu’étant associé majoritaire de la société souscriptrice des contrats d’assurance-vie, ne pouvait ainsi déclencher cette garantie.

Ce présent arrêt vient préciser que la qualité d’associé majoritaire de la société de l’assuré reste sans incidence sur ce principe déjà connu et qu’elle ne confère donc pas de droit d’agir au seul titre de la qualité d’assuré, à l’encontre d’un courtier pour un éventuel détournement de primes, lorsque ces primes ont été versées par le souscripteur. Cet arrêt est l’occasion de rappeler que dans les trois parties au contrat d’assurance vie (souscripteur, assuré et bénéficiaire), l’assuré ou « tête assurée » est la partie la plus neutre malgré sa position de pivot dans le dénouement du contrat.

 Il ne faut pas confondre la notion d’assuré pour l’immense majorité des contrats (notion reprise dans l’article L310-1) et l’assuré en assurance-vie qui est la personne dont le décès ou la survie entraine le versement d’un capital ou d’une rente ; en assurance-vie, l’assuré n’est pas obligatoirement le souscripteur.


Philippe Luttmann, Directeur Juridique, Fiscal et Conformité,
et Midori Mousseigne, Assistante Juridique, Fiscal et Conformité