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27 janvier 2017

La voiture connectée en question

Elle fait peur ou passionne. Bref la voiture sans conducteur ne laisse pas indifférent. Au point que les tables rondes et autres conférences des assureurs accordent une place croissance à cette thématique. C’était le cas des rendez-vous de la Roam de janvier 2017.
 

D’entrée de jeu, Yves Pasquier-Desvignes, Président du constructeur Volvo Cars France, présente une vidéo de son modèle de voiture autonome. L’auto prend les rênes de la conduite. A tout moment, le conducteur peut reprendre le volant. « Ce n’est pas de la fiction, la technologie est désormais mature ; pour autant, elle reste opérationnelle dans un cadre bien précis », tempère Yves Pasquier-Desvignes.

L’on s’en doute, une telle présentation ne laisse pas indifférent, tant elle a un impact sur l’ensemble de l’écosystème de l’assurance et tout particulièrement l’auto dont elle devrait chambouler tout le modèle. Il est donc urgent de réfléchir d’autant que « la généralisation de cette innovation est prévue pour 2021 au grand maximum chez Volvo Cars », assure son président. Entre-temps Philippe Roche, Directeur associé de l’agence Accomeauto, s’interroge sur les usages de cette nouveauté. « Quel est degré d’acceptabilité d’un tel modèle et, surtout, le profil de celui qui va l’acheter ? » De ces réponses dépendra l’ampleur du parc installé et les impacts sur la sinistralité et le nombre de places de stationnement, sans oublier la problématique de la pollution. Dans le premier cas, on estime à 20 % la baisse du volume de sinistres et dans le dernier, la voiture autonome devrait contribuer à régler la problématique écologique très actuelle en ce moment du fait des pics en matière de gaz à effet de serres.

confvoitureconnectee« Tout le monde devient bon conducteur »
Au-delà de ce triple constat, Malek Semar, co-fondateur et CEO de la société Globe introduit un constat qui alimente le débat vu à travers le prisme de l’assurance : « la voiture autonome rendra tout le monde bon conducteur ; comment alors assurer un tel risque ? » Selon Stéphane Désert, membre du bureau de la Roam et Directeur général de la Mutuelle de Poitiers, « la voiture connectée pose à la fois un problème technique et comportemental, deux révolutions concomitantes avec pour inquiétude la baisse de la matière assurable. Souvenons-nous, dans les années 70, on nous annonçait des changements en matière de sinistralité ; on comptait 20 000 morts sur les routes et aujourd’hui moins de 4 000. La baisse de la matière à assurer annoncée dans l’assurance n’a pas eu lieu ». Il faut donc tout relativiser.

Pour autant, l’économie des contrats d’assurance va changer ; le conducteur ayant un rôle de moins en moins important, la sinistralité va baisser. En revanche un point nouveau intervient : l’assureur pourra accéder plus facilement aux données et les partager pour des besoins de tarification et connaître les causes des accidents. Cela nécessite des partenariats à tisser entre assureurs, constructeurs et autres jeunes pousses concernées. Enfin, le cadre réglementaire va évoluer ; le bonus/malus, par exemple, n’aura plus la même signification et il faudra harmoniser le cadre européen. En fait, quoi qu’il en soit, il faudra se poser les bonnes questions sur le sort réservé à l’assurance auto : qui distribue ? qui indemnise ? L’assureur aura toujours sa place dans le nouveau dispositif.

Reconnaissant la réalité de la voiture connectée, Yann Arnaud, Directeur du pilotage et de la performance du pôle assurances dommages de la Macif, recentre le débat sur l’assureur : « comment va-t-il se comporter dans cet environnement ? Difficile de savoir réellement à ce jour. Une certitude, comme l’ont souligné les autres intervenants, la sinistralité va baisser. Actuellement, nous en sommes à une phase transitoire très importante : celle des grandes alliances avec les constructeurs. Avant que la voiture autonome vienne bouleverser notre métier, du temps aura passé. »

Les constructeurs bientôt assureurs ?
Pour autant, tous les porteurs de risques s’accordent à reconnaître qu’il est important de se préparer à ces changements et identifier qui seront les acteurs de demain. Cela est d’autant plus important que certains constructeurs pensent qu’ils pourront jouer un rôle en matière d’assurance de demain. Volvo Cars estimant son modèle de demain très sûr, entend ainsi se positionner sur le terrain de la Responsabilité civile, qu’elle prendrait en charge, par exemple. Reste la question de savoir qui portera le risque !
Tous les arguments bien pesés, le débat est davantage dominé par les usages que la technologie, déjà maîtrisée et prête. Certains envisagent même la fin du permis de conduire dans une trentaine d’années. Mais à court terme, tous se mettent d’accord pour reconnaître que l’évolution technologique de la voiture va entraîner une augmentation de la qualité du risque auto.

Le dernier mot revient à Me Alain Bensoussan, avocat en droit du numérique et des technologies avancées. En médiateur, il rassure les assureurs, « on aura plus que jamais besoin de vous, car vous devez vous apprêter à gérer les données ambulantes dans ces véhicules autonomes qui seront de véritables accumulateurs d’énergies mobiles ». L’espoir fait vivre.
 

Emmanuel Mayega