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14 février 2020

Le marché de la complémentaire santé : une trajectoire sous influence réglementaire

Il s’agit d’une publication de l’expertise center Santé-Prévoyance d’Optimind, spécialiste du conseil en gestion de risques, qui accompagne les organismes porteurs de risques, banques et grandes entreprises dans la définition de leur stratégie de la gestion des risques et de la transformation. L’occasion de souligner ses capacités à acter les mutations enregistrées ces dernières années sur un marché où pèse plus que jamais le réglementaire. La société rappelle les deux réformes réglementaires qui avaient vocation à améliorer le taux d’équipement des foyers et le reste à charge (RAC). Avec en toile de fond l’émergence du 100 % santé qui a en ligne de mire le RAC Zéro. Il remarque également la mutation technologique qui balaie la branche.

ANI et généralisation de la complémentaire santé

D’entrée de jeu, la publication revient sur les deux réformes réglementaires qui ont traversé la branche. Et rappelle la loi inhérente à la sécurisation de l’emploi, publiée le 13 juin 2013 et connue sous le nom générique de l’ANI. Elle a eu pour corollaire de généraliser la complémentaire santé au sein des entreprises. « 95 % des salariés du privé contre 74 % en 2013, bénéficient aujourd’hui d’une couverture santé proposée par leur employeur », rappelle la publication. Cette dernière note qu’il n’y a pas d’ « évolution marquante » en termes de garanties proposées, les nouveaux bénéficiaires de cette innovation profitent d’une réelle amélioration de la prise en charge de leurs frais de santé, du fait de plusieurs facteurs. Au-delà, il est à noter qu’avant la mise en place de cette réforme, près de 25 % des salariés du privé devaient souscrire une assurance individuelle, ce qui entraîne de fait une inégalité entre les individus. En revanche, la généralisation des complémentaires santé collectives a offert aux salariés la possibilité d’obtenir une amélioration de leur couverture pour un coût équivalent ; ce grâce à une prise en charge a minima, de la moitié des cotisations par l’employeur. Contrairement aux couvertures individuelles, les couvertures collectives capitalisent sur la mutualisation : absence de tarification selon l’âge, économie du questionnaire médical. Autre enseignement souligné par l’Expertise Center d’Optimind, « des améliorations notables des garanties proposées en assurance individuelle avaient été réalisées entre 2011 et 2016 , notamment dans la prise en charge des actes en optique et en dentaire » ; pour autant, « il n’a jamais été possible pour les assureurs de proposer, à un coût identique pour l’assuré, les mêmes niveaux de garanties qu’en collectif », constate Optimind. Comme pour corroborer ses observations, il met en avant les études de satisfaction menées à la suite de la l’entrée en vigueur de l’ANI : « les salariés ayant bénéficié du nouveau dispositif le préfèrent largement aux régimes préexistants, même si les nouveaux assurés bénéficient de régimes bien moins protecteurs et d’une prise en charge patronale plus faible. »

Corollaire, l’impact de l’ANI au sein des entreprises du privé s’est fait surtout ressentir sur deux postes : l’optique et le dentaire. Dans le premier cas, la part des organismes complémentaires dans les remboursements se stabilise à 74 % et les ménages prennent en charge 21 %  et la charge de la sécurité sociale seulement 5 %. Dans cet environnement, l’introduction de contrats responsables en 2015 a contribué à stabiliser le marché du fait du triptyque : mise en place des plafonds de prise en charge, limitation des remboursements à une paire de lunettes tous les deux ans et introduction du bonus de fidélité et du report du forfait en cas de non-consommation les années précédents.

Avec la montée en puissance du RAC, le taux de renoncement aux soins s’envole. Comment y faire face ? le 100 % santé a été adopté, avec pour objectif de contenir le RAC et le ramener carrément à zéro. Pour les contrats à couverture faible, le cabinet Optimind anticipe une orientation vers le panier 100 % Santé dans 70 à 90 % des cas, du fait d’un important reste à charge sur les autres paniers. Selon ce cabinet, « les bénéficiaires de régimes de milieu ou haut de gamme ne devraient pas être particulièrement impactés par la réforme. » et de prévoir que l’on attend pour ces derniers un choix des produits des paniers 100 % Santé compris entre 10 % et 30 %, hors optique où les assurés devraient s’orienter vers le panier 100 % Santé dans près de 50 % des cas pour les contrats milieu de gamme.

En définitive, le 100 % Santé devrait améliorer les garanties des assurés ayant un contrat individuel (retraités, étudiants) ou des contrats collectifs bas de gamme. En fait, la réforme 100 % Santé bénéficiera surtout à des assurés exclus du marché de la santé ou ayant des niveaux de consommations modérés et peu générateurs de dépassements. En résumé, le marché des renforts restera sensiblement identique et les porteurs de risques devront travailler sur des offres permettant de capter une population intéressée par des prestations de grande qualité.

Les sociétés d’assurance tirent les marrons du feu tandis que ANI et Solvabilité 2 sont les catalyseurs de la concentration du pôle mutualiste

Selon la publication d’Optimind, les dernières réformes ont eu pour effet de redistribuer les cartes au sein de la branche santé. La mise en place des contrats responsables et la généralisation de la complémentaire santé, voire le 100 % santé crée un nouveau rapport de force entre les acteurs. Les réformes comme la généralisation de la complémentaire santé dans le privé ont plutôt bénéficié aux sociétés d’assurances par rapport aux mutuelles et institutions de prévoyance.

Une nouvelle décennie avec un déficit qui encourage des réformes

La branche maladie de la Sécurité Sociale prévoit un déficit à 5,1 Mds d’euros pour 2020. Il faut faire quelque chose. De nouvelles réformes sont donc à prévoir. Et dans cette logique, les assureurs seront mis à contribution. Cela suffira-t-il pour arrêter l’hémorragie ?  Face à une concurrence qui se veut rude et la menace à peine voilée des assurtech, les GAFA en tête, il faudrait chercher le salut ailleurs.

Emmanuel Mayega