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15 juillet 2019

La loi Pacte revisite l’épargne salariale et retraite

Promulguée le 22 mai, la loi Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises) comprend des mesures en faveur de l’épargne salariale, de la retraite supplémentaire et s’intéresse également à l’assurance vie. Des décrets d’application viendront préciser ces changements avant la fin de l’année.

L’avenir sourit à l’épargne salariale

Initialement prévues dans le projet Pacte puis intégrées à la loi de financement de la Sécurité sociale 2019, des mesures ont supprimé depuis début 2019 le forfait social sur l’intéressement pour les entreprises de moins de 50 salariés et de 50 à 249 salariés. Elles devraient favoriser la conclusion d’accords d’intéressement dont la Direction générale du Trésor évalue le gain à 0,4 point de PIB sur le long terme. Selon cette dernière, les nouvelles conditions devraient augmenter le montant global d’intéressement de 2 Mrds € dans les entreprises de moins de 50 salariés (en plus des 1,5 Mrds actuels) et de  0,5 Mrds € dans les entreprises de 50 à 249 salariés (en plus des 1,0 Mrd € actuels), ce qui induira une hausse des rémunérations. Pour les entreprises de moins de 50 salariés, le forfait social sur la participation et l’abondement de l’employeur a également été supprimé. A ce jour, seulement 16 % des  salariés d’entreprises de moins de 50 salariés disposent d’au moins un produit d’épargne salarial, selon le ministère de l’Economie et des Finances.

Une étude de l’Association française de la gestion financière (AFG) fait apparaître une collecte nette positive de + 1,5 Mrd € en 2018 pour l’épargne salariale. Des conditions que l’on n’avait pas connu depuis 2011 : « Les salariés investissent de plus en plus dans leurs dispositifs d’épargne salariale et retraite par des versements volontaires, en hausse de 9 % l’an dernier », rapporte l’AFG. Ils utilisent cette épargne avant tout pour l’acquisition de la résidence principale. A cette fin, l’apport personnel moyen provenant de l’épargne salariale en vue de concrétiser l’achat de ce bien immobilier a été de 11 900 euros et a concerné 161 000 foyers.
En outre, la loi Pacte va contraindre chaque branche professionnelle à négocier dans l’optique de mettre en place un dispositif d’intéressement, de participation ou un plan d’épargne salariale avant le 31 décembre 2020. Avec les incitations de la loi Pacte, les perspectives du marché de l’épargne salariale sont donc largement ouvertes et devraient paver la voie aux distributeurs de produits d’épargne collectifs dans les entreprises, courtiers en tête.

Epargne retraite : la concurrence va s’intensifier

La Drees  (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques)* estimait à 13,6 Mrds € le montant des cotisations collectées au titre de la retraite supplémentaire en 2016 (+ 6 % en euros constants par rapport à 2015). Les produits d’épargne retraite sont nombreux : PERE (Plan d’épargne retraite entreprise), PERCO (Plan d’épargne retraite collectifs), articles 39, articles 82, etc.  Quant au montant versé sur ces produits, il était de 6,1 Mrds € en 2016 (+ 7 % en euros constants par rapport à 2015). Les prestations servies par ces placements ne représentaient cette même année que 2 % de l’ensemble des prestations retraite versées. Selon le Cor (Conseil d’Orientation des retraites), la pension moyenne de retraite se situera entre 36 % et 46 % à l’horizon 2060 contre 52 % actuellement, comparée au revenu d’activité moyen. Les gouvernements successifs n’ont donc d’autre choix que de favoriser l’épargne retraite comme solution pour faire face à une inévitable baisse des pensions de retraite de base et complémentaires.

Le gouvernement considère que la loi Pacte « transforme en profondeur les dispositifs actuels d’épargne retraite afin que cette épargne soit plus attractive pour les épargnants et contribue davantage au financement de l’économie ». Cela passe par la création d’un régime uniformisé de plan d’épargne retraite (PER) et par l’harmonisation des sources d’alimentation (versements volontaires, collectifs,…), des modalités de sortie (capital ou rente viagère), de la fiscalité sur ces produits. La gestion pilotée sera le mode par défaut, comme c’était déjà le cas pour le PERCO, et le forfait social sera réduit à 16 % pour les PER qui prévoient une gestion pilotée avec au moins 10 % de l’actif détenues en titres éligibles au PEA-PME (plan d’épargne en actions destiné au financement des PME et ETI). Autres nouveautés majeures de la loi Pacte : la portabilité d’un produit retraite à l’autre et l’encadrement des frais de transferts. De plus, une obligation de conseil aura lieu, aussi bien pour les PER collectifs qu’individuels, aux étapes significatives de la vie du produit en fonction de l’horizon de placement long terme.

« Suite à la refonte des produits d’épargne retraite, la relation client et le devoir de conseil deviendront particulièrement importants en raison de l’intensification de la concurrence sur le marché, l’enjeu principal étant celui de la rétention du client », est-il notifié par Mazars, cabinet spécialisé dans l’audit et le conseil aux entreprises dans un avis d’expert publié en mars.  En effet, les gestionnaires d’actifs pourront bientôt vendre de l’épargne retraite, ce qui va intensifier la concurrence pour les assureurs actifs sur ce créneau.  Et Dominique Bui, Senior manager Conseil Assurance chez Mazars de spécifier : « le facteur déterminant sera d’établir une stratégie de distribution nouvelle afin de bénéficier des opportunités offertes par le projet de loi Pacte. »
*Panorama de la Drees, Les retraités et la retraite, Edition 2018

Flécher l’assurance vie vers l’épargne retraite

La loi Pacte donne la possibilité de transférer des contrats d’assurance vie de plus de huit ans sans supporter la fiscalité d’un dénouement vers le plan d’épargne retraite créé par la loi Pacte jusqu’au 1er janvier 2023 si les titulaires sont à plus de cinq ans de l’âge légal de la retraite. En contrepartie, le plafond d’exonération des intérêts sera multiplié par deux dans le cadre de l’imposition sur le revenu. Cette mesure concerne uniquement les contrats proposés par un même assureur. Concrètement, elle va être portée à 9 200 € pour une personne seule contre 4 600 € précédemment et va atteindre 18 400 €  pour un couple contre 9 200 €.

Une idée en trompe-l’œil, selon l’Institut des Actuaires. Si ce dernier estime que la transférabilité facilitera l’accès à de nouvelles opportunités d’investissement pour certains épargnants, sous réserve d’une mise en œuvre exemplaire du devoir de conseil afin de bien mettre en balance les coûts induits et les nouveaux risques, « elle engendre un risque sérieux de diminution des rendements à long terme pour l’ensemble des épargnants et d’un moindre financement de l’économie réelle » . En outre, elle « représente un risque majeur sur la solvabilité et la liquidité pour le marché de l’assurance vie et un risque de report sur les contribuables en cas de transferts massifs », estime l’institut des Actuaires. Car les organismes d’assurances vont devoir adapter leur gestion d’actifs à cette possibilité de transfert pour respecter leurs engagements, ce qui les obligera à conserver une partie des actifs suffisamment liquides et à gérer à plus court terme tout en réduisant les placements sur le long terme, potentiellement plus volatils et moins liquides. L’organisme représentant ces professionnels estime également que les réserves des assureurs (provision pour participation aux bénéfices et réserve de capitalisation) qui leur donnent de la souplesse dans la gestion pourraient se révéler insuffisantes si les taux d’intérêt repartaient rapidement à la hausse.

Par ailleurs, la loi Pacte impose aux assureurs vie de fournir une information détaillée sur chaque unité de compté (performance brute et nette de frais, frais prélevés) et d’indiquer, sur leur site Internet, les taux de rendement et de valorisation offerts sur l’ensemble de leurs contrats, même lorsqu’ils ne seront plus commercialisés. En outre, chaque contrat multi-support proposé devra comprendre des unités de compte investies dans des entreprises des secteurs de l’écologie ou de la solidarité en 2020 tout en proposant les deux à la fois à partir de 2022.

Geneviève ALLAIRE