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4 septembre 2020

Crise Covid-19 : l’une des plus grandes pertes assurées de l’histoire de la réassurance

Si la pandémie a réduit les ratios combinés des réassureurs, le secteur affiche une solide croissance des revenus avec des primes brutes émises en hausse. C’est du moins le constat formulé par l’agence de notation Moody’s à l’issue d’un premier semestre 2020 tout-à-fait singulier, avec la pandémie de Covid-19 en toile de fond.

A partir de l’analyse des résultats d’une cohorte de 15 réassureurs* sur les six premiers mois de l’année, Moody’s révèle que les rendements des investissements se sont redressés au cours du premier semestre mais que les demandes liées à la pandémie ont fait passer les ratios combinés de 92,8 % au premier semestre 2019 à 102,8 % au premier semestre 2020. Sur la cohorte, les sinistres induits par la pandémie se sont élevés à 8,6 Mrds USD au cours des six premiers mois de 2020, ce qui comprend 7,6 Mrds USD de sinistres en non-vie. Les entreprises ayant des opérations de réassurance vie ont fait état de pertes de 1,0 Mrd USD dans leurs livres de mortalité, provenant principalement des États-Unis et du Royaume-Uni. Toutefois, Moodys’ pointe qu’une grande incertitude demeure concernant la trajectoire des sinistres, tant dans le domaine de la réassurance non-vie que dans celui de la réassurance vie. Face à cette situation, certains réassureurs n’ont pas hésité à déclarer que la crise du coronavirus fera date dans le secteur comme « l’une des plus grandes pertes assurées de l’histoire ».

Au cours du premier semestre 2020, les revenus nets ont été des plus limités pour les réassureurs sur lesquelles s’est penché Moody’s, se limitant à 1,7 Mrd USD contre près de 16 Mrds USD pour la même période de 2019. Le secteur IARD (non-vie) a déclaré un nombre important de sinistres supplémentaires liés aux coronavirus lors du deuxième trimestre avec une majorité d’estimations pour les sinistres encourus mais non déclarés à ce stade. Du reste, les sinistres payés restent encore faibles. A cela s’ajoutent les pertes mondiales assurées liées aux catastrophes naturelles et aux pertes causées par l’homme. Celles-ci se sont élevées à 31 milliards de dollars au cours du premier semestre 2020, ce qui représente une augmentation de 1,5 % par rapport à l’année précédente, toujours selon les évaluations réalisées par Moody’s. La difficulté à estimer la sinistralité est à relever parce que le coronavirus est une catastrophe qui s’étale dans le temps, d’une part et il y a, d’autre part, des incertitudes liées à la durée de la crise et à la gravité du ralentissement économique.

Selon Moody’s, la ligne de l’interruption d’activité est celle qui soulève le plus de contestations. En effet, nombreux sont les réassureurs à avoir affirmé l’absence de couverture pour les événements pandémiques, invoquant la nécessité que des dommages matériels déclenchent la couverture des pertes d’exploitation. L’agence de notation constate que « dans de nombreuses juridictions, les assureurs subissent aujourd’hui une pression importante de la part des législateurs, des régulateurs et des assurés pour payer les sinistres des entreprises ayant connu une interruption ». Les lignes de crédit et de cautionnement seront également sous pression car la récession entraîne une augmentation des faillites, même si de nombreux gouvernements, en particulier en Europe, ont limité les dommages en mettant en place des régimes de réassurance couverts par l’État ou des garanties en vue de protéger l’économie.

Les réassureurs vie ont commencé à déclarer les sinistres induits par la pandémie au cours du deuxième trimestre. La plupart des sinistres proviennent de polices de protection contre la mortalité aux États-Unis, où il est généralement fait appel à ce type de couverture dans le cadre de la planification successorale (legs de biens aux héritiers et règlement des droits de succession, par exemple).

Petit coin de ciel bleu : il est fait état d’une amélioration allant au-delà des secteurs d’activité auparavant déficitaires, avec des primes brutes émises en hausse de 6,4 % par rapport au premier semestre 2019 pour le groupe de réassureurs étudiés par Moody’s. L’augmentation des prix lors de la politique des renouvellements récents se situe en moyenne dans la fourchette moyenne à élevée à un chiffre. Et Moodys’ de pondérer cette bonne nouvelle : « Bien que les hausses de prix soient bénéfiques, elles seront compensées dans une certaine mesure par une réévaluation des risques, sur une base ajustée des expositions dans de nombreux secteurs d’activité et la baisse considérable des taux d’intérêt depuis le début de l’année. »

La saison des ouragans qui pourrait alourdir un peu plus la facture des réassureurs pour l’année 2020 ne fait que commencer et pourrait faire évoluer encore la situation. Toutefois, si les fonds propres de la cohorte de réassurance sont inférieurs aux niveaux de fin d’année 2019, le capital demeure solide, aidé entre autres par le rebond des marchés d’actions au second trimestre.

Geneviève Allaire

* La cohorte sur laquelle s’étaye Moody’s comprend Swiss Re, Munich Re, Hannover Re, Berkshire Re, Scor SE, Fairfax Financial, Markel, Everest Re, Alleghany, Arch Capital, Axis Capital, Partner Re, W.R. Berkley, Renaissance Re et Lancashire.