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21 mars 2022

Créer une compagnie d’assurances, challenge réussi pour MILA

Gérard Deray a fondé un cabinet de courtage spécialisé  dans  l’immobilier, après être passé par la banque d’affaires, où il a traité plus d’une trentaine de transactions de M&A à Londres et à Paris pour de grandes banques anglo-saxonnes dans les années 1990. Ses expériences multiples l’ont conduit à se lancer dans la création d’une compagnie d’assurances. Mila a été agréée par l’ACPR le 20 octobre 2021, ce qui en fait la 5e nouvelle compagnie d’assurances créée en France en plus de 40 ans.

Jean Boucher, l’autre co-fondateur de Mila, a effectué l’ensemble de sa carrière chez Allianz, en France et en Allemagne. Actuaire, il a participé au lancement de business units et occupé des responsabilités dans différents univers : opérations, marketing, finance, développement de produits, digital, big data & IA.

 

[La Nouvelle Revue du Courtage / LNRC] Pourquoi créer une compagnie d’assurances, un projet ardu et très consommateur de capitaux ?

[Gérard Deray] Cette idée de création est née en 2014, et les spécialistes de ce type de montage m’avaient averti : monter un dossier d’agrément auprès de l’ACPR nécessite de mobiliser des centaines de milliers d’euros en conseil et comporte beaucoup d’incertitudes.

Malgré tous ces avertissements amicaux, nous avons choisi de concrétiser cette ambition. D’ailleurs, nous avons choisi avec Jean, de créer cette compagnie sans conseil externe. Nous avons bâti le dossier d’agrément en interne avec nos équipes. De la même manière, nous avons réalisé nos trois levées de fonds (12 m€) sans conseil (en dehors d’Aramis, nos avocats).

 

[LNRC] Comment vous y êtes-vous pris pour parvenir à l’agrément de l’ACPR à l’automne 2021 ?

[Gérard Deray] J’ai commencé par rassembler une équipe, et Karine Lazimi- Chouraqui m’a permis de rencontrer mon futur associé, Jean Boucher, responsable digital, Big Data et intelligence artificielle d’Allianz. Il m’a rejoint tout début 2021. Mila est une co-fondation, et nous travaillons d’arrache-pied depuis 15 mois pour rassembler autour de nous des professionnels assez téméraires pour défricher de nouveaux horizons.

Pour financer le démarrage de notre activité, mon expérience en banque d’affaires m’a permis de gérer nos besoins sans recourir à l’accompagnement d’un conseil. Nous en sommes à 3 levées de fond pour le moment, alors qu’avant d’obtenir l’agrément, il ne nous était pas possible de démarrer une quelconque activité commerciale. Il nous fallait donc convaincre des investisseurs de financer une activité qui n’existait pas encore.

Notre troisième chantier a consisté à rechercher des traités de réassurance. Aujourd’hui, nous en avons signé quatre avec Swiss Ré et Hanover Ré, des acteurs mondiaux de la réassurance. La signature de Mila vaut donc largement celle d’autres compagnies du marché.

Puis, nous avons constitué notre dossier de demande d’agrément, avec la certitude que l’ACPR allait faire une analyse très poussée de notre proposition. Pour réussir à les convaincre, avoir une vision claire et une ambition précise était indispensable.

En octobre 2021, Mila est née, elle a un nom facile à écrire et à retenir, qui fonctionne bien dans toutes les langues (anglo-saxonnes, slaves, latines…). Nous devons maintenant passer à une nouvelle étape de son histoire : son développement.

 

[LNRC] Quel est le positionnement de Mila ?

[Gérard Deray] Notre positionnement actuel est simple : nous vendons deux produits à destination des professionnels de l’immobilier : la Garantie Loyers Impayés (GLI) et l’assurance Propriétaire Non Occupant (PNO). Mila s’interdit pour le moment de vendre ses produits en direct et travaillera exclusivement via le courtage pour son offre à destination des professionnels de l’immobilier. La vente en BtoC sera un axe de développement dans un second temps. Ainsi, nous visons des partenariats avec des courtiers qui disposent d’administrateurs de biens ou d’agences immobilières dans leur réseau amical ou professionnel, ainsi que des courtiers spécialisés sur ce segment de clients.

Jean Boucher et moi n’avons pas lancé une compagnie d’assurances pour copier un modèle économique existant. L’idée d’aller chercher une part de marché sur des activités très concurrentielles n’avait rien de très excitant.

Observant que les assurances du monde immobilier sont fragmentées, avec une quinzaine de produits représentant entre 200 millions et 2 milliards de primes chacun, nous parions sur la place que peut prendre Mila. Ces activités sont souvent jugées par les autres acteurs trop petites, techniques et incertaines. Aucun acteur majeur ne va prendre le risque d’investir en informatique ou en hommes pour bouleverser ces chaînes de valeur.

Notre analyse a conclu qu’il existait une place à prendre pour un assureur malin, digital et spécialisé dans chacun de ces compartiments de marché que Mila va investir pas à pas.

 

[LNRC] Comment Mila est-elle organisée ?

[Gérard Deray ] Notre équipe compte aujourd’hui 21 collaborateurs, qui se répartissent entre Paris (16 personnes) et La Rochelle (5 personnes aujourd’hui).

Contrairement à d’autres acteurs, gérer, y compris les sinistres, est une réelle volonté de notre part. En revanche, si certains courtiers veulent conserver la gestion, nous sommes capables de nous adapter pour respecter leur modèle économique.

Nous avons une approche digitale, non seulement sur la partie front-office comme la plupart des nouveaux acteurs qui révolutionnent la souscription uniquement.

Pour nous, l’innovation se joue aussi dans le back-office, au niveau de la gestion des contrats et des sinistres.

Nous avons adressé un premier enjeu dans la fabrication ex nihilo d’outils dont nous avions besoin pour dévoiler de nouvelles promesses, comme celle-ci : « nous payons toujours et tout de suite », ce qui implique une résilience de notre technologie, une architecture de données robuste. Cette conception nous permet aussi de proposer en quelques semaines des espaces clients mieux pensés et plus agiles que les autres acteurs. Nous sommes capables de livrer à nos clients des outils ultra-performants qui commencent déjà à bouleverser les habitudes et à livrer des promesses.

Notre avance en matière d’expérience client est importante et nous avons à cœur de maintenir ce savoir-faire innovant vis-à-vis des autres acteurs du marché.

 

[LNRC] Quels sont vos projets pour les mois à venir ?

[Gérard Deray] Mila a été bien accueillie. Dès son démarrage, nous avons été contactés par des courtiers qui avaient des problématiques précises. Nous avons été capables de répondre en moins de deux mois par un nouveau produit entièrement packagé. Nous avons fait preuve d’agilité mais aussi d’une grande qualité dans le développement de l’offre d’un point de vue technique.

Nous avons aujourd’hui plusieurs milliers de clients et nous avons comme objectif de couvrir plusieurs dizaines de milliers de biens fin 2022. L’année qui commence nous permettra de démontrer que notre approche est pertinente et se confronte favorablement à la réalité du marché.

Nous allons aussi lancer très prochainement d’autres produits (MRI, MRH locataire…) toujours en rapport avec le monde de l’immobilier avec la même volonté de casser les silos et de fluidifier la chaîne de valeur.

Par ailleurs, Mila dispose d’un positionnement idéal pour collecter de la donnée. Nous sommes structurés pour l’analyser. En matière de loyer impayé, quel est le profil le plus risqué, l’étudiant ou la famille de 4 personnes ? Un bien à Paris ou à Lille ? Un appartement 2 pièces ou 3 pièces ? Nous pourrons prochainement répondre à ces questions sur des bases très factuelles.

 

Propos recueillis par Céline Meslier