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19 janvier 2021

Proposition de Loi « Autorégulation du secteur du courtage » : notre profession ne manque pas d’idées, elle a besoin d’un débat !

Rappelons les objectifs de la réforme :

Créer entre 2 et 6 associations professionnelles représentatives de la profession avec l’obligation pour les courtiers d’adhérer à l’une d’entre elles,
Confier des missions à ces associations pour élever le niveau de la profession et accompagner le courtage de proximité,
– Dans l’objectif de protéger les consommateurs.

Ce projet a pris la forme d’un amendement dans la loi PACTE de 2019, retoqué par le Conseil Constitutionnel, celui-ci considérant qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.

Mais le texte discuté aujourd’hui n’est plus le même ; les objectifs de la réforme ont été dévoyés pour aller vers plus de contrôle, ce que PLANETE CSCA craint et dénonce depuis mai 2019. Ce ne sont pas les courtiers qui ont changé d’avis, ce sont le texte et le contexte qui ont évolué.
Si la volonté du législateur n’est pas d’aller vers du contrôle, pourquoi ne pas l’écrire tout simplement ?

Une profession responsable et organisée

PLANETE CSCA représente les trois quarts de la profession de courtiers d’assurances en chiffres d’affaires et une majorité de ses salariés. En tant qu’organisation professionnelle, elle est au contact direct de ses adhérents, capable de les sensibiliser et de se saisir des sujets aussi structurants que la formation professionnelle ou les échanges automatisés avec les compagnies d’assurance via le développement d’outils de place (EDI Conformité). PLANETE CSCA siège au CCSF, instance de dialogue et d’actions, qui a prouvé à nouveau son efficacité récemment sur le sujet de démarchage téléphonique.

PLANETE CSCA se mobilise aujourd’hui pour réclamer un dialogue justifié avec les pouvoirs publics : la réforme s’engage sur de mauvaises bases, et elle va manquer son objectif louable et partagé de mieux protéger les consommateurs.

Les modalités prévues par la proposition de loi qui sera discuté le 20 janvier 2021 en Commission des Finances, puis le 27 janvier par les députés, nous questionnent en termes d’efficacité et de coûts induits, mais aussi d’équité et de capacité à répondre aux attendus de la réforme.

Des modalités qui posent question

– En termes de coût
Il semble que l’étude de son impact sur les cabinets de courtage n’ait pas été évalué, tandis que son coût annuel est estimé à 20 millions d’euros , une charge nouvelle difficile à supporter dans l’absolu en pleine crise économique, mais surtout pour quel bénéfice ? Le courtage est constitué à 89% de TPE/PME, et ne vit pas dans un monde à part. Les courtiers seront percutés de plein fouet par la crise économique en 2021 et 2022.
Rapportée aux 40 000 professionnels concernés, cette charge annuelle s’élèverait à minima à 500 €, qui viennent s’ajouter aux 150 € de l’ACPR et aux 25 € de l’ORIAS.
Quel autre secteur d’activité verra ses obligations augmenter de 300% en 2021 pour financer sa régulation ?

– En termes d’efficacité
Lorsqu’elles auront reçu leur agrément de l’ACPR, les différentes associations vont développer chacune un système d’informations pour récolter les mêmes données sur leurs adhérents, recruter des profils professionnels pour se structurer en allant rechercher les mêmes compétences, et nous aurons ainsi de 2 à 6 organisations différentes, concurrentes pour remplir un même objectif : réguler le courtage d’assurances.
Ne serait il pas plus efficace de concentrer toutes les données et les compétences au sein d’un organisme unique ?

– En matière d’équité
La PPL actuellement sur la table induit deux formes de distorsion de concurrence, en raison du statut de l’intermédiaire d’une part, et de son implantation géographique de l’autre.
1ère segmentation : aujourd’hui, n’est concernée par la réforme française qu’une partie de la distribution en assurances, alors que l’ensemble des acteurs de cette chaîne est encadré par une directive européenne unique, la DDA. Les agents généraux d’assurances notamment ne sont pas concernés par la Proposition de Loi.
2ème segmentation : conformément au droit européen, seuls les courtiers français seront soumis à cette nouvelle législation. Les opérateurs en Libre Prestation de Service, pourtant pointés du doigts par certains, n’auront pas l’obligation d’adhérer à une association, même s’ils en auront la possibilité.
Nous aurons mécaniquement une protection du consommateur à deux vitesses, en fonction de la manière dont il a souscrit ses produits.
Pourquoi une réforme qui vise à améliorer la protection du consommateur exclut-elle d’emblée une partie de la distribution ?

– Sur sa capacité à répondre aux attendus
Cette nouvelle loi, si elle va à son terme, ajoutera une épaisseur au millefeuille administratif, annulant ainsi les efforts de simplification souhaités par le pouvoir exécutif.
Est-elle nécessaire dans les conditions de son examen actuel ?

Elle comporte des fragilités juridiques, notamment sur la question du contrôle des pratiques commerciales, que la DDA met exclusivement à la charge des régulateurs, sans qu’ils aient en Europe la possibilité de le déléguer à des associations. Il serait tout-à-fait dommageable de négliger ce point et d’aboutir à une réforme incompatible avec le droit européen.
Un avis juridique a-t-il été rendu par le Conseil d’Etat ?

Une accélération du calendrier de mauvais augure pour permettre d’améliorer la proposition de loi

S’il parait raisonnable de s’appuyer sur les représentants d’une profession pour la réformer efficacement, le bon sens n’a guère sa place dans la situation provoquée par le passage de cette proposition de loi en procédure accélérée.
Que s’est il passé dans le courtage d’assurances ces derniers mois qui justifie une telle précipitation ?

Les courtiers ont déployé avec volontarisme la loi PACTE, devenant des distributeurs incontournables des produits PER, dont ils n’ont cessé de faire la pédagogie. Depuis le début de la crise du coronavirus, ils se sont fait les relais sur le terrain des politiques de soutien au tissu économique, épaulant leurs clients entrepreneurs dans les situations difficiles et inédites qu’ils rencontraient.

Cette procédure accélérée entrave la possibilité d’un débat, qui pourrait cependant faire gagner la proposition de loi en clarté et en efficacité. Parmi les points d’amélioration possibles du texte, on peut citer a minima :
Lever l’ambiguïté avec un bannissement clair du contrôle sous toutes ses formes dans les missions confiées aux associations,
Un champ d’application qui couvre tous les intermédiaires déjà inclus dans la DDA,
Une date d’application reportée au 1er janvier 2023.

Le retrait du texte dans sa forme actuelle serait pourtant la meilleure solution pour permettre un débat de fond apaisé. PLANETE CSCA répondra présent à toute sollicitation permettant d’envisager d’autres voies pour permettre l’élévation du niveau de la profession, notamment un réexamen des moyens et missions de l’ORIAS et de l’ACPR, qui sont sur le papier les organismes les mieux placés pour répondre aux attendus de la réforme.

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