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10 décembre 2021

Transmission des cabinets de courtage : Un maître mot, anticiper

Questions-réponses avec Pierre-Olivier Chanove, Président et fondateur d’Asselio, et Jean-François Walbert, Président du conseil de surveillance du groupe France Courtage.

Pierre-Olivier Chanove et Jean-François Walbert, vous êtes à l’initiative au sein de PLANETE CSCA de l’organisation de ces sessions courtes et pratico- pratiques sur la transmission des cabinets de courtage, pourquoi ?

[Pierre-Olivier Chanove] En tant que syndicat, nous sommes souvent interrogés sur ce sujet et je voudrais d’abord rappeler qu’il n’y a aucune obligation de céder son affaire. En France, nous disposons de la retraite à la carte, entre 62 et 67 ans. Les activités que nous exerçons n’ont pas le degré de pénibilité des métiers du bâtiment, ou d’autres professions, et il est possible de prolonger sa vie professionnelle si on le souhaite. Jean-François et moi-même avons souvent été en position d’acquérir des cabinets, et il nous semble important de partager notre expérience avec des confrères qui souhaitent préparer leur transmission, car nous voyons certaines situations se présenter de manière récurrente.

[Jean-François Walbert] Certes, il n’existe pas d’obligation liée à l’âge mais j’observe une certaine lassitude du courtier, qui peut se sentir isolé face à la montée des périls, notamment la réglementation qui s’impose et qu’il peut avoir du mal à assumer. Pour cela, le courtier doit s’appuyer sur le syndicat, qui est en mesure de lui apporter un véritable accompagnement. Les services proposés et les compétences partagées par PLANETE CSCA peuvent être un réel soutien. Sur le sujet de la transmission, un partenariat a d’ailleurs été noué depuis l’année dernière avec Largillière Finance.

Mais un jour, dans tous les cas de figure (cession, départ à la retraite, décès ?…), le départ devient effectif. Comment s’y préparer ?

[Pierre-Olivier Chanove] Pour se lancer, il faut d’abord un état d’esprit :

  • Être clair avec son projet, ce que l’on souhaite faire après, je dirais même qu’ il faut commencer par cela.
  • Être clair avec ses collaborateurs. Les équipes font confiance à leur dirigeant depuis des années, et cette relation mérite d’être prise en considération. Lorsque le dirigeant atteint l’âge présumé de la retraite, il est légitime que ses salariés s’interrogent. J’ai récemment été présenté comme consultant dans une entreprise qui était à la vente, je trouve que cela manque d’honnêteté et de courage vis-à-vis de personnes qui vous ont fait confiance. Il faut bannir les non-dits autour du départ, pour le bon déroulé de l’opération.

De manière pragmatique, il faut aussi revisiter quelques points-clés :

  • Calculer son âge légal de départ à la retraite, situé aujourd’hui entre 62 et 67
  • Préparer sa Team pour présenter son affaire sur le marché !
    • Mobiliser son expert comptable, et Prendre un avocat spécialisé.

Par exemple, il faut impérativement régler des points comme le compte courant du chef d’entreprise (ne pas devoir d’argent à sa structure), avoir des bilans à jour s’il existe une SCI, …

Ce n’est pas à l’acquéreur de faire ce travail de présentation des comptes, le cédant doit être organisé pour aller rencontrer le marché, ce qui lui évitera un certain amateurisme qui pourrait le disqualifier ou dégrader la valeur de son cabinet.

[Jean-François Walbert] Récemment, j’ai travaillé sur une opération où il y avait un intermédiaire.

Tout était anticipé, les questions que je pouvais avoir à l’esprit ont été traitées sans avoir besoin de les poser. Cela m’a facilité les choses et surtout permis de gagner du temps.

En cédant son affaire, le courtier doit effectuer une révolution culturelle : il ne peut pas vendre et conserver tous ses avantages. Concrètement, il doit laisser derrière lui la gestion des ressources humaines après son départ, et bien évidemment des avantages liés à ses activités, comme son véhicule de fonction ! Il faut qu’il soit prêt sur ces points-là également.

Quel serait le rétroplanning idéal ?

[Pierre-Olivier Chanove]Chaque situation est différente, puisque nous avons évoqué le fait de mettre ses activités au carré et de constituer sa « Team ». Il faut toutefois un temps minimum de 18 mois/2 ans pour préparer sereinement une transmission.

[Jean-François Walbert] Reste le problème délicat de l’information à son environnement professionnel, je pense tout particulièrement aux compagnies d’assurance. Elles disposent d’un relationnel important qui peut accompagner la cession. Ce point doit également être anticipé par le courtier.

De votre point de vue, est- il envisageable pour un professionnel de réaliser une partie de ses actifs et de rester en activité ?

[Pierre-Olivier Chanove] À deux ans de la retraite, quelqu’un qui est son propre patron depuis des décennies peut-il devenir salarié ? Cela mérite une sérieuse introspection !

[Jean-François Walbert] Je pense que c’est possible moyennant certaines conditions. J’ai l’expérience d’une opération en 2008 dans laquelle le dirigeant avait conservé 20 % du capital. Nous nous étions mis d’accord sur ce qu’il continuerait à faire à moyen terme. En réalité, il souhaitait se décharger de la partie administrative et conformité, être épaulé pour ne plus travailler seul, mais le suivi commercial des grands comptes lui allait très bien. Aujourd’hui, il est toujours avec nous ! A partir du moment où la délimitation des territoires s’appuie sur une vision partagée, cela peut fonctionner.

Autre cas d’école, peut-on racheter un cabinet aux activités diversifiées et ne conserver que la partie Vie ou IARD ?

[Jean-François Walbert] Là encore, c’est l’état d’esprit qui va être important, quels que soient les accords écrits passés entre les différentes parties. Ainsi, il y aura deux courtiers pour un même client, ce qui est plus compliqué à gérer. Mais j’ai rencontré le cas par le passé.

[Pierre-Olivier Chanove] Je pense que ces opérations sont difficiles. Prenons le cas d’un cabinet qui a des activités Dommage, Collectives et Patrimoine. Avant la loi PACTE, j’aurais eu tendance à dire qu’on pouvait envisager un rachat. Mais je suis plus fermé sur le sujet aujourd’hui, car la loi Pacte a pour conséquence de faire converger la partie Gestion de patrimoine et l’épargne-salariale au sein du produit PER. C’est sujet à contentieux entre le cabinet cédé et le cabinet conservé.