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7 décembre 2021

Assurance emprunteur : la résiliation à tout moment en bonne voie

Déposée le 29 octobre dernier au Parlement, la proposition de loi permettant à un emprunteur de résilier à tout moment son assurance de prêt a été adoptée le 25 novembre par l’Assemblée nationale à la quasi-unanimité. La prochaine étape aura lieu en 2022, avec une dernière lecture au Sénat.

Le gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte le 2 novembre dernier. Il ouvre le droit de résiliation sans frais à tout moment pour ceux qui ont souscrit une assurance de prêt dans le cadre d’un achat immobilier et non plus seulement la première année du contrat puis une fois par an. A ce jour, les délégations d’assurance ne représentent que 12 % des contrats d’assurance de prêt, les banques détenant 88 % de ce marché. Selon Astrid Cousin, directrice de la communication du spécialiste de l’assurance emprunteur sur Internet Magnolia, « Rappelons que les marges en assurance emprunteur atteignent en moyenne 68 %. Pourtant, les contrats proposés par les assureurs externes, deux à quatre fois moins chers que ceux des banques, sont tout autant voire mieux couvrants. Une aberration, unique sur le marché de l’assurance, que cette loi devrait rectifier, nous l’espérons ».

Les banques accrochées à l’assurance de prêt

En faveur de la résiliation à tout moment de l’assurance emprunteur car la considérant comme plus avantageuse pour les consommateurs, l’UFC-Que Choisir a appelé les parlementaires à « résister aux tentatives de manipulations du lobby bancaire » lors de l’examen du projet de loi et estime que la résiliation à tout moment pourrait libérer un montant de 550 M€ par an en termes de pouvoir d’achat au bénéfice de tous les emprunteurs. Selon l’association de défense des consommateurs, l’assurance emprunteur permet chaque année aux établissements bancaires de percevoir 7 Mrds € de cotisations d’assurance de prêt suite aux achats immobiliers. Ses calculs indiquent que sur 100 € payés par les personnes ayant souscrit un tel emprunt auprès d’une banque, seulement 32 € leurs sont reversés sous forme d’indemnisation, ce qui entraîne une marge bénéficiaire de 68 %. « Un tel niveau est sans égal en assurance. À titre de comparaison, il est deux à trois fois supérieur à ceux pratiqués en assurances habitation et automobile », pointe l’UFC-Que Choisir. Cette dernière avait lancé une action de groupe en novembre 2020 contre l’établissement bancaire LCL devant le tribunal judiciaire de Lyon sur la base de plaintes de consommateurs. Ceux-ci avaient en effet relevé que LCL se livrait à des pratiques non conformes afin de dissuader les emprunteurs qui souhaitaient changer d’assurance de prêt de se tourner vers la concurrence. Car les banques sembleraient peu enclines à lâcher cette manne : « Décidé à conserver jalousement sa rente, le lobby bancaire fait feu de tout bois pour empêcher la mise en place de la mesure, en agitant le chiffon rouge du risque de démutualisation alors que les emprunteurs souffrant de risques aggravés de santé sont déjà nombreux à s’assurer auprès des acteurs alternatifs », s’emporte l’UFC-Que Choisir.

Afin de comparer les prestations des banques et des autres porteurs de risques, Magnolia s’est livré à des simulations sur le coût des assurances. Pour un couple de trentenaires en CDI, non fumeurs et sans problème de santé qui a emprunté 1,25 M€ sur 25 ans, le comparateur a calculé qu’une délégation d’assurance pourrait lui faire économiser 36 000 € au total car il paierait 50 000 € d’assurance avec la banque tandis qu’avec une assurance externe, le coût total ne serait que de 7 000 € (24 € par mois avec une assurance externe versus 150 € par mois avec l’assurance de la banque). Et Astrid Cousin d’espérer « maintenant que les banques vont, cette fois, jouer le jeu de la résiliation sans user de leurs manœuvres dilatoires habituelles et laisser leurs clients faire baisser le coût de leur emprunt de manière conséquente ». Lors de l’examen du projet, un amendement a été adopté. Avec celui-ci, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) sera chargé de dresser le bilan des différentes dispositions inscrites et de remettre au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de la loi.

Depuis plus d’une décennie, plusieurs textes de loi ont apporté des évolutions vis-à-vis de l’assurance du crédit immobilier (loi Lagarde du 1er juillet 2010, loi Hamon du 17 mars 2014, amendement Bourquin de la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016). Toutefois, ils n’avaient atteint que partiellement leur but. C’est la députée Patricia Lemoine qui est à l’origine de cette proposition de loi, sur la base du constat suivant : « aucune de ces mesures législatives n’a, jusqu’à aujourd’hui, véritablement permis de libéraliser le marché de l’assurance-emprunteur qui reste en situation de quasi-monopole au profit des banques ».

Elargir le droit à l’oubli

Par son titre II, le texte que porte Patricia Lemoine concerne également la convention Aeras (s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé) et traite du droit à l’oubli pour les malades et les anciens malades. La députée estime en effet que la convention actuelle est insuffisante au regard des avancées médicales et des attentes des consommateurs et des associations de patients. En conséquence, le texte prévoit l’instauration d’une négociation entre les parties prenantes de la convention Aeras (État, fédérations professionnelles des assurances et des banques, associations de malades et consommateurs) dans un délai de trois mois à compter de la publication de la loi afin de réduire les délais du droit à l’oubli pour les différents cancers et d’élargir le dispositif à d’autres pathologies chroniques comme le diabète.

Geneviève Allaire