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13 novembre 2020

Assurance crédit : 2021, année de tous les dangers

Après d’excellentes performances en 2019, les trois principaux assureurs crédit garantissant à l’échelon mondial les entreprises (Euler Hermès, Atradius et Coface) avaient entamé 2020 avec des résultats très satisfaisants, selon un rapport du courtier Aon publié début novembre. Mais la crise a changé la donne.

En 2019, les chiffres d’affaires d’Euler Hermès, d’Atradius et de Coface avaient respectivement augmenté de + 7,7 %, + 6,0 % et + 6,9 % pour des résultats nets estimés à 380 M€, 228 M€ et 147 M€. En 2020, une fois confrontés à la crise, leur premier réflexe a été de réduire, voire de résilier les garanties. La tarification de l’assurance crédit a été revue à la hausse et les assureurs souhaitent désormais mieux contrôler la souscription, y compris pour les affaires nouvelles. En vue d’éviter une contraction majeure du crédit inter-entreprises, un grand nombre d’Etats de l’Europe de l’Ouest ont mis en place des dispositifs d’assurance crédit visant au maintien des garanties. « 2020 sera évidemment très différente, même si l’augmentation de la sinistralité déjà constatée sera en partie absorbée par les mesures étatiques de soutien qui ont été prises dans la plupart des plus grands marchés d’assurance-crédit », relève le rapport.

Si l’on s‘attarde sur la courbe du ratio sinistres/primes (S/P), un infléchissement apparaît très nettement dès la fin du premier trimestre 2020, attestant d’une forte hausse de la sinistralité mais cette dégradation n’en est qu’à ses débuts et l’on ne sait, à ce stade, si le point haut sera atteint en 2020 ou 2021, lors de l’arrêt progressif des mesures de soutien des Etats. Chez les trois leaders de l’assurance crédit, Aon estime une réduction approximative de leurs engagements de 8 % en 2020 par rapport à 2019, soit environ 200 Mrds €. En particulier, Atradius et Euler Hermès ont dans le même temps augmenté la rémunération du risque et la prime d’assurance, Coface ayant aussi agi en ce sens mais plus raisonnablement, toujours selon le rapport d’Aon.

Parallèlement, une contraction du commerce mondial de – 15 % est prévu en 2020, les secteurs de l’énergie, de la métallurgie et des transports étant les plus durement touchés tandis que les services IT et l’industrie pharmaceutique devraient être parmi les seuls secteurs à bien s’en sortir cette année. A l’issue du premier trimestre 2020, la récession a été quatre fois plus forte que  pendant la crise de 2008-2009. La hausse des faillites pourrait être de plus de 30 % en moyenne dans le monde, dans des situations contrastées en fonction des pays (+ 65 % aux Etats-Unis, + 25 % en Chine et en Europe, + 20 % en France).

Le rapport du courtier souligne que les trois assureurs crédit ont renforcé leurs fonds propres les années précédentes dans des proportions importantes, comme s’ils avaient pressenti l’arrivée d’une crise inédite en 2020. Côté retour sur investissement, cet indicateur devrait significativement diminuer cette année mais la réassurance, par le biais de l’Etat ou du secteur privé, viendra soulager cette baisse. Si la solidité des trois assureurs crédit est bien réelle, il convient cependant de se poser la question de leur résistance à un choc systémique mondial comme la crise du coronavirus ou bien celle de 2008-2009, étant donnée la nécessité de recourir à des dispositifs étatiques pour venir combler les manquements de l’assurance crédit dans l’optique d’agir contre un resserrement du crédit et une contraction des échanges.

A l’aune de ces analyses, Louis Bollaert, directeur crédit, financement, risques politiques et cautions d’Aon France, met en garde contre les difficultés à venir : « 2020 sera […] extrêmement complexe, mais nous devons surtout craindre 2021. En effet, des mesures sans précédent ont été prises presque partout dans le monde, réduisant considérablement le nombre de défaillances à court terme. L’heure de vérité sonnera quand on débranchera les différentes perfusions, et il faudra une bonne dose de lucidité et une excellente boussole pour naviguer dans ces eaux durablement troubles ».

Au plan mondial, les assureurs-crédits ont approximativement des engagements à hauteur de 3 000 Mrds €  et leurs fonds propres cumulés représentent moins de 10 Mrds €.

Geneviève Allaire